Depuis l'arrêt de la Cour d'appel de Mons, le dossier Strada est sur toutes les lèvres à La Louvière. Ce mercredi, le conseil communal extraordinaire tenu à ce sujet devait amener des réponses aux nombreuses questions soulevées par l'opposition.
A conseil communal extraordinaire, une assistance bien plus fournie que d'ordinaire dans la salle du conseil à l'Hôtel de Ville de La Louvière. Les gens étaient venus assez tôt d'ailleurs pour avoir de la place et le succès fut tel qu'il a fallu aller chercher des chaises dans les autres salles pour pouvoir faire assoir le plus de monde possible.
En rigolant, certains (présents pour la première fois à un conseil communal) avaient lancé qu'ils avaient préparé le popcorn pour la séance gratuite du mercredi soir.
Mais si le western qu'ils s'étaient imaginé n'a pas eu lieu, les échanges n'ont pas toujours été très amicaux et les questions ont d'ailleurs fusé. D'abord à Maitre Leroy, l'avocate de la Ville venue s'expliquer au nom de son cabinet pour ce dossier et ensuite au Collège et au bourgmestre.
Comment en est-on arrivé-là? A qui la faute? 85 millions à payer? Autant de questions auxquelles l'avocate a répondu dans la première partie du conseil dédiée aux questions juridiques en recontextualisant et en faisant un rapide rappel des faits.
Difficile évidemment de résumer chaque question et chaque réponse d'une séance qui a duré plus de 4h.
"1000€ par Louviérois! Quel fiasco", pour le PTB
Ce qui a fait le plus réagir les citoyens, c'est, évidemment, le montant évoqué un peu partout et qui a fait bondir pas mal de monde dans l'opposition. 85 millions, la somme est énorme. "Ce qui fait 1000€ par habitant", a d'ailleurs fait le calcul Antoine Hermant qui avait préparé une longue liste de questions pour cette séance. Le PTB rappelant "qu'on était les seuls à la base à ne pas avoir voté pour ce projet. Quel fiasco pour la Ville. En plus pour une friche."
Ce montant, la Ville, au travers de maitre Leroy s'en défend et le conteste même. "Aujourd'hui, personne ne peut fixer le montant des préjudices, a affirmé le conseil juridique. Un expert a été mandaté et il fera une estimation. Pour rappel, il y aura préjudice et pour Wilhelm&Co mais aussi pour la Ville de La Louvière. Pour nous, ce montant de 85 millions est totalement impensable. Ils se basent sur une estimation de 15% de bénéfices perdus à cause de cette rupture de contrat. Or, quand on fait des analyses, on se rend compte que leurs bénéfices sont de l'ordre peut-être de 1% dans d'autres dossiers. Et subitement, pour ce dossier précisément, il serait de 15%? C'est aberrant, il est surtout abusif."
Un dossier Arcea qui pose question
L'un des éléments qui a amené à ce jugement de la Cour d'appel de Mons, c'est un contrat signé avec le bureau d'étude Arcea sur la manière de redonner du peps à ce lieu, réservé au départ au projet Strada. Un contrat de moins de 30000€ signé qui a fait pencher la balance vers Wilhem&Co en appel.
Là où la Ville invoquait la caducité du contrat, car la société a clairement indiqué ne pas pouvoir réaliser le projet tel qu'il a été conçu initialement, la Cour d'appel estime qu'il s'agit d'une résiliation de contrat tacite. Notamment en raison de cet engagement avec Arcea. Ce qui a fait réagir Xavier Papier (Les Engagés et Alternatives): "A l'époque, aviez-vous conscience qu'un tel élément pouvait amener une telle décision?"
Ce a quoi a répondu Maitre Leroy de manière directe: "Jamais, je n'aurai pensé qu'un autre marché de moins de 30000 pouvait avoir un tel impact. Non. Pour nous, c'est même surprenant."
Avant de s'engager avec Arcea, un autre bureau d'étude avait été sollicité mais n'avait finalement pas été introduit "et que dit-il?", soulève Antoine Hermant (PTB). "Qu'il y avait déjà un contrat passé pour cet endroit! Cela n'a pas mis la puce à l'oreille de qui que ce soit?"
De la part d'Olivier Destrebecq et du MR, on a aussi voulu savoir pourquoi avoir pris ce risque et sur les suites à donner. "Aller en Cassation et dire qu'on aura une ardoise remise à zéro, c'est tromper le citoyen", a d'ailleurs réagi le Libéral qui se désole "d'avoir eu un conseil communal défensif plutôt qu'un conseil communal pédagogique."
Car c'est l'une des grandes informations de ce conseil communal, la Ville envisage de se pourvoir en Cassation, comme on vous l'a annoncé ce mercredi soir durant la réunion politique.
Une communication qui irrite une frange de l'opposition
D'ailleurs, la communication de la Ville, et donc de la majorité, a beaucoup irrité l'opposition durant ce conseil. Car au moment des débats, une vidéo "de la Ville qui souhaitait faire le point sur le dossier de la Strada" est apparue avec l'avocat de la Ville en plein écran pour revenir sur cet arrêt de la Cour d'appel.
"Maitre Leroy, là, on a l'impression que vous êtes les avocats de la majorité et non de la ville", a d'ailleurs énoncé Xavier Papier.
Ce sur quoi a enchérit Destrebecq: "En publiant cette vidéo, vous faites fi du jugement de la cour d'appel mais est-ce le rôle de votre bureau d'avoir un avis aussi partisan et ce, sur le compte des citoyens de La Louvière? C'est finalement dire le contraire de ce qu'il se trouve dans le jugement."
Des questions politiques en deuxième partie (plus courte)
Après avoir fait le tour des questions juridiques directement posées à Maitre Leroy, c'est au tour de la partie politique d'intervenir. Et à la question de la vidéo et de la communication, Jacques Gobert, le bourgmestre (PS) a tenu à se défendre. "En demandant ce conseil communal, vous nous avez obligés à revoir la communication pour que le citoyen puisse appréhender le plus justement possible l'arrêt. Mais vous avez contribué à rendre ça incompréhensible. A l'image aussi du montant de 1000€ par personne. Le tribunal ne relève aucune faute dans le chef de La Louvière et personne ne peut citer un montant."
Si la Ville entend bien "payer 0€" à Wilhelm&Co, Xavier Papier pose lui la question de savoir comment payer cela. "Ce sont les Louviérois qui vont devoir payer et il n'y aura pas 50 solutions. Il va falloir être imaginatif car on est déjà au plafond en termes d'impots et on est déjà sous plan financier."