Depuis quelques années, l'introduction de l'informatique en tant qu'outil pédagogique semble une évidence et suscite peu de débats. Une passivité générale qui étonne et interpelle les membres du Club Achille Chavée de La Louvière. Durant deux ans, ils ont donc organisé des ateliers pour étudier les conséquences de la numérisation de l'école et présentent leurs conclusions dans un livre.
L'usage du numérique s'inscrit de plus en plus dans l'organisation de l'enseignement. C'est un fait. Une progression qui s'est accélérée avec les dispositions prises en période Covid. Mais avec quel bénéfice pour les élèves, les enseignants et le monde de l'école en général ? Une question à la base d'un travail collectif mené par les membres du Club Achille Chavée.
" On introduit le numérique à l'école, par des expériences pilotes, mais qui s'étendent de plus en plus sans jamais se poser la question de savoir si le numérique permet de résoudre le gros problème que connaît notre enseignement. C'est à dire celui de l'échec scolaire et de la relégation. Dans l'enseignement, qui est organisé en filières, on remarque que les enfants issus des milieux les plus défavorisés ont un parcours scolaire très chaotique ", explique Yves Herlemont, promoteur de l'atelier.
Au terme de deux années de lectures, d'analyses et de discussions, les auteurs du projet estiment que l'usage du numérique à l'école, s'il n'est pas complètement à bannir, ne résout pas les questions d'inégalité. Bien au contraire.
" Le numérique, au lieu d'améliorer les inégalités, semble les creuser un peu plus, aussi bien au niveau de la possession du matériel numérique qu'au niveau de l'usage du numérique. La lecture sur écran est, par exemple, beaucoup plus difficile que la lecture sur papier. Les principales victimes de cette lecture sur écran, ce sont celles et ceux qui ont déjà des problèmes de lecture et de compréhension de la lecture ", poursuit Yves Herlemont.
Le club Achille Chavée pointe également d'autres risques liés à la pédagogie par le numérique. Parmi ceux-ci, citons la course technologique effrénée que pourraient se livrer des écoles en concurrence, la mainmise des entreprises du secteur informatique sur l'enseignement ou encore une diminution des interactions entre enseignants et élèves. Des constats publiés dans un livre destiné à susciter le débat.
" On va essayer d'utiliser cet ouvrage pour poursuivre le débat avec d'autres associations ", confirme Jean-Pierre Michiels, responsable du Club Achille Chavée. " On veut également avoir une réflexion avec les pouvoirs publics qui ont l'air de marcher à pas forcés dans cette démarche. Il faut avoir une discussion avec les enseignants et les former. Il ne faut pas imposer arbitrairement cette modernisation qui risque d'avoir des conséquences fâcheuses."
L'ouvrage, paru aux Editions du Cerisier, est disponible au prix de 10 euros, au Club Achille Chavée ou en librairie.
N. Elet